JEUNESSE ET ADDICTIONS
05 septembre 2024
Les générations se suivent et les addictions évoluent. La jeunesse actuelle cède avant toute chose au plus grand mal de son temps : les écrans.
Tabac, alcool et cannabis n’en restent pas moins présents et la perception des risques fluctuante.
Selon l’étude « Les jeunes et leur santé »1, 79 % des 18-25 ans ont au moins un comportement addictif et 3 % montent jusqu’à 4 ou plus… Le classement ? Les grands « vainqueurs » sont sans surprise les réseaux sociaux, qui focalisent 58 % de l’ensemble des répondants et 64 % des femmes. Suivent les jeux vidéo pour 38 % des répondants et 50 % des hommes. « La surconsommation des écrans et les jeux vidéo sont souvent cités spontanément et classés dans les addictions, avec un impact délétère direct sur la santé : manque de sommeil, inversion du cycle de sommeil, problèmes aux yeux, etc. Des effets indirects sont également cités, le temps passé devant les écrans coupant du monde et incitant moins à s’activer, avec un double effet négatif, sur la santé physique et psychique », relève Sophie Ferreira, déléguée générale de la Fondation APRIL. Les entretiens individuels réalisés dans le cadre de l’étude mettent en exergue la difficulté à réguler l’usage des écrans, en particulier du téléphone. Malgré la (re)connaissance du danger de surexposition aux écrans, les jeunes y consacrent une part conséquente de leurs journées : 6h30 en moyenne durant la semaine. Ils sont même près d’1/4 à y passer plus de 9 heures par jour.
Tabagisme et plus si affinités…
Les « anciennes » addictions cèdent le pas à l’hyperconnexion, mais elles n’ont pas disparu pour autant. Le tabagisme sous toutes ses formes (cigarette, cigarette roulée, chicha, narguilé…) est pratiqué par un tiers de 18-25 ans, dont 1 jeune sur 5 quotidiennement. La cigarette électronique avec nicotine séduit pour sa part 27 % des déclarants, dont 7 % plusieurs fois par jour. « Concernant l’alcool, près de d’1 jeune sur 10 est dans l’excès, avec une consommation quotidienne et/ou plus de 10 verres par semaine. A contrario, ils sont 68 % à boire moins de 5 verres par semaine », complète Sophie Ferreira.
Les drogues et psychoactifs sont pour leur part omniprésents chez les jeunes, 34 % reconnaissant en avoir consommé au-delà d’un essai. Un pourcentage qui passe à 43 % pour les CSP+, 41 % pour les Parisiens, et 39 % pour les hommes. Ajoutez les 24 % qui ont déjà essayé au moins une drogue une fois et plus de la moitié des 18-25 ans est concernée. Le cannabis est le produit phare chez les consommateurs réguliers (11 %), occasionnels (19 %) et « uniques » (11 %), mais les antidouleurs à base d’opiacés, à l’instar du fentanyl et de l’oxycodone sont eux aussi répandus dans les deux premières catégories (respectivement 9 % et 11 %). Plus inquiétant encore : « pour le consommateur régulier de drogues, un rapport à la compulsion, au plaisir immédiat, l’emporte sur toute autre forme de temporalité. La multi-addiction n’est ainsi pas envisagée comme un facteur de comorbidité supplémentaire en termes d’impact sur la santé, mais plutôt comme un état de fait. » Difficile dans ce contexte de parler prévention…
Mobilisation floue
La forte sensibilisation, en milieu scolaire notamment, fait que les comportements addictifs sont identifiés comme tels par les jeunes, mais avec des référentiels plus mouvants et clivants. Les pratiques à risques sont ainsi souvent banalisées dans certains contextes, comme les soirées étudiantes. Les jeunes concernés adoptent souvent des postures de minimisation ou d’évitement, les frontières entre consommation « acceptable » et consommation « problématique » restent floues. Les repères ne sont pas toujours bien intégrés, de même que les mécanismes de basculement dans l’addiction et les conséquences à terme. « La flexibilité de perception est d’autant plus aisée à développer qu’il existe parfois l’impression que ces addictions ne sont « pas graves » ou réversibles, notamment avec l’âge, et que jeunesse rime aussi avec expériences et excès, notamment dans des contextes de consommation conviviale. » Un tableau préoccupant qu’un chiffre vient contrebalancer en guise de conclusion : Si les 18-25 ans cèdent parfois aux tentations, ils sont 79 % à assurer profiter de la vie en respectant leur corps et leur santé.
- Étude BVA Xsight pour le compte de la Fondation APRIL.